Homélie : Union éternelle – Jeudi 1er novembre 2018, Toussaint année B.

Publié le Publié dans Homélies

Père Pierre BLANC
Paroisse St Pierre et st Paul
en val d’Azergues
Diocèse de Lyon

UNION ÉTERNELLE

« Réjouissez-vous ! Soyez dans l’allégresse ! »

La fête de ce jour célèbre la réussite du plan d’amour de Dieu sur l’homme.

Des millions de personnes sont déjà dans le bonheur éternel de Dieu, et intercèdent pour nous auprès de Lui, afin que nous les rejoignions un jour.
Car Dieu nous a créés à son image et à sa ressemblance, en faisant que nous ne soyons pas seulement un paquet de matière organisée, mais que nous ayons une âme. / Et il a mis, en cette âme, une soif d’absolu que rien, sur la terre, ne peut combler.

Déjà des millions de nos devanciers sont parvenus au But. Déjà ils sont auprès de Dieu. Déjà ils Le connaissent en le contemplant, et non plus par des mots. Et ils partagent la joie des anges à le connaître et à l’aimer, à le connaître pleinement et à l’aimer infiniment.
Et leur joie n’est plus mêlée d’inquiétude, car ils savent que, désormais, plus rien ne peut les séparer de Celui qu’ils aiment. Ils sont avec Lui pour toujours.

Cette contemplation de Dieu, dans l’éternité, n’est pas un simple regard extérieur ; c’est une transformation intérieure. / Saint Bernard a essayé de le faire saisir par l’image suivante: « Comme l’air inondé de lumière solaire se transforme en la clarté-même de cette lumière, ainsi, chez les saints, toute manière humaine de sentir se fondra et s’écoulera entièrement dans la volonté de Dieu. »
Ainsi, bien que nous restions, évidemment des personnes distinctes de Dieu, l’acte de notre volonté sera, pour ainsi dire, une participation du vouloir divin, en sorte que nous voudrons tout comme Dieu le veut et par participation à son vouloir, et que, / même notre Salut nous réjouira moins en tant qu’il est ‘notre’ salut, qu’en tant qu’il est l’accomplissement de la volonté de Dieu sur nous.
De même exulterons-nous, spirituellement, en voyant la multitude des bienheureux, car, aimant Dieu, nous nous réjouirons de voir sa volonté se réaliser en un grand nombre de ses créatures.

Cette compréhension de ce que sera notre union éternelle à Dieu n’est pas sans importance pour notre vie ici-bas, *car, ce qui trouvera son accomplissement dans l’au-delà, sera ce que nous aurons déjà commencé à vivre dès maintenant.

La Vie Eternelle, en un sens, commence dès cette terre.
• Dieu ne pourra combler notre attente que si cette attente existe ; il ne pourra combler notre amour que si cet amour n’est pas mort.
• Nous ne pourrons goûter le bonheur de partager le vouloir divin et d’en voir l’accomplissement, que si, déjà pendant notre existence terrestre, nous avons cherché à vouloir ce que Dieu veut.
• Et il serait vain de croire que nous serions aptes à bénéficier, après notre mort, de la vision de Dieu, si nous avions, ici-bas, négligé toute occasion de Le connaître.
Dieu mènera à son achèvement ce que nous l’aurons laissé accomplir en nous. Si nous lui avons fermé la porte, nous resterons emmurés pour l’éternité.

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Par contre, la considération de la fin que Dieu propose à notre vie doit être pour nous, dès ici-bas, une cause de joie et de courage.
Nous savons, en effet, que tout ce que nous faisons ici-bas en union à Dieu est une préparation de notre Éternité et de celle de nos frères ; et, outre les joies spirituelles que nous pouvons éprouver dans les moments de ferveur — et qui nous donnent comme un avant-goût de ce que sera le bonheur du Ciel — nous expérimentons la paix intérieure que procure l’assurance que, si nous gardons notre main dans la main du Christ, rien ne pourra nous nuire.
Tout peut être retourné en occasion de progrès spirituel, comme le firent les saints dans les grandes difficultés qu’ils traversèrent.
Et même lorsque, devenu bien vieux, notre corps ne pourra plus rendre beaucoup de services terrestres, nous pourrons encore, dans le mystère de la communion des saints, offrir notre amour de Dieu et l’acceptation de nos souffrances en union au Christ, pour le Salut du monde.
Si elle est unie au Christ, à aucun moment une vie humaine n’est inutile ; et nous devons, durant toute notre vie terrestre, travailler avec ardeur, ayant la ferme assurance que, si nous ne lâchons pas Dieu, notre vie ne peut échouer.

Notre nature spirituelle et notre vocation éternelle sont aussi le fondement de la dignité de la personne humaine. Si toute vie humaine est sacrée, aussi bien la vie du vieillard que la vie de l’enfant dans le ventre de sa mère, c’est que l’homme n’est pas qu’un morceau de chair.

Reste que la sainteté ne nous est pas naturelle ; elle est un don de Dieu.
L’origine-même du mot l’indique : Primitivement, ‘saint’ signifiait ‘séparé’ (‘qui est au dessus du monde’).
• En ce sens-là, Dieu seul est saint — ce que nous disons d’ailleurs dans le ‘Gloire à Dieu’: « Car toi seul es saint ».

• Puis on a appelé saints ceux que Dieu s’est acquis, ceux qu’Il a fait ‘renaître d’en haut’, ceux à qui Il a communiqué sa Vie. Et, en ce sens-là — que l’on trouve dans plusieurs lettres de Saint Paul —, tous les chrétiens sont appelés ‘saints’.
Le même Saint Paul nous dit d’ailleurs : « vous qui êtes nés d’en haut (par le baptême), cherchez les réalités d’en haut ».
Il ne suffit pas, en effet,
– d’avoir été, par le baptême, incorporés au Christ ;
– d’être mis, en lui, en lien stable avec la Sainte Trinité,
– d’être faits enfant adoptifs de Dieu par union au Fils unique et éternel de Dieu.
Encore faut-il accueillir en soi cette présence divine, et se laisser animer par l’Esprit-Saint,

Ainsi notre conduite sera vraiment sainte, c’est à dire que nous vivrons dans l’union à Dieu, ayant en nous les sentiments-mêmes que Dieu nous inspire, faisant l’œuvre qu’Il attend de nous sur la terre ; étant, comme dit Saint Jean ‘dans le monde, mais non pas du monde’, c’est à dire présents dans le monde, mais nous conduisant selon les idées de Dieu et non selon celles du monde.
Et c’est ainsi que nous pouvons rénover le monde. C’est ainsi que les saints ont rénové leur époque.

Que chacun de nous, là où il est, cherche donc à être un homme né d’en haut, un homme qui n’est pas à la remorque du monde, mais qui lui apporte quelque-chose — quelque-chose venant de Dieu —. Que tout, en nous, naisse d’en haut : notre pensée et notre conduite.

Et, pour cela, prions les Saints ! Ils sont auprès de Dieu. Demandons-leur d’intercéder en faveur de nous, pour que Dieu nous accorde sa grâce, dont nous avons besoin pour les imiter sur la terre et les rejoindre après cette vie.

Amen