Homélie – STOP au mauvais ! – 27 dimanche du temps ordinaire, année A

Publié le Publié dans Homélies

Père Przemyslaw KREZEL
Paroisse St Pierre St Paul
en Val d’Azergues
Diocèse de Lyon

STOP au mauvais !
Homélie prononcée au cours de la Sainte Messe
pendant laquelle Eudes, jeune à l’âge scolaire, a été baptisé
27 dimanche du temps ordinaire, année a, le 8 octobre 2017
Église st André à Chazay d’Azergues

Lectures :
Is 5,1-7 : Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n’ai fait ?
Ph 4,6-9 : Mes frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur […], prenez-le en compte.
Mt 21,33-43 : Il louera la vigne à d’autres vignerons…

Je commencerai aujourd’hui par une anecdote…
Durant toute l’année, une personne souhaitait adhérer à une communauté paroissiale bien en vogue dans son diocèse.
Son modérateur n’y était pas très favorable… car la personne en question ne faisait pas partie du cercle des gens qui fréquentaient habituellement son église. Elle n’était connue de personne… Son statut social était aussi bien diffèrent…
De surcroît, nouvellement convertie, sa vision des choses était souvent dérangeante et atypique.
Bien évidemment, ce modérateur, en tant que responsable de paroisse, ne pouvait se permettre de l’informer directement qu’il ne la voulait pas chez lui…

Ainsi, lorsqu’elle vint pour la énième fois lui demander comment elle pourrait enfin entrer dans sa communauté, il lui répondit :

– Chère Madame, je vous donne un conseil :
Rentrez chez vous et parlez-en avec le Bon Dieu qui vous fera connaitre sa volonté. Ensuite, vous me transmettrez ce qu’il vous a dit.

Et la femme n’est plus revenue.
Puis un jour, le modérateur la rencontre par hasard dans un magasin.
Ne voulant pas être antipathique, il lui dit « bonjour » et pour entretenir la conversation, la questionne :
Alors, avez-vous parlé avec Dieu de votre volonté d’entrer dans notre communauté ?
– Oui, bien sûr ! a-t-elle répondu
– Et quelle réponse vous a-t-il donnée?
– Hum…, Il m’a encouragée à garder le moral, car lui-même désire y rentrer depuis 20 ans.1

Mes frères et sœurs bienaimés,

Si je me suis permis de vous raconter cette anecdote, c’est pour vous rappeler que nous, disciples de Jésus le Messie, baptisés au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, membres du corps mystique du Christ, c’est-à-dire de l’Église catholique apostolique et romaine, nous devons toujours éviter les comportements sectaires.
Nous ne pouvons jamais être installés dans nos certitudes, enfermés dedans, ouverts seulement à nous-mêmes et à nos semblables, ceux qui pensent comme nous.
L’esprit étroit, mesquin et exclusif est étranger à la catholicité dont le caractère englobant prouve, par définition, sa détermination à réunir et communier avec l’extérieur.
Néanmoins, nous devons nous interroger :
l’attitude d’ouverture signifie-t-elle que nous devons tout prendre argent comptant et nous ajuster systématiquement à tous les flux qui traversent la pensée et régissent les modes des sociétés contemporaines ?

Non, mes frères bienaimés…. Non !
L’ouverture n’équivaut pas à l’action dénuée d’une solide réflexion préalable et d’un fin discernement spirituel.
Le catholique, par principe, est une personne ouverte à toute personne de bonne volonté, comme le fut et l’est son maître le Christ Jésus,.
Cependant, là où la bonne volonté n’est plus au rendez-vous…
Là où la mauvaise foi la remplace… là où la lumière se transforme en pénombre et la fumée de Satan se dégage…, le chrétien devrait devenir catégorique et sans équivoque. Son «rejet » est de rigueur !
Ainsi, le véritable disciple du Christ sait faire le tri.
Il sait choisir entre le bien et le mal, entre le bon et le mauvais.
Il est un pêcheur de perles qui explore jusqu’au fond le sujet…
Il a le goût du beau, du vrai, du bon !

Relisons le fragment de la lettre de saint Paul aux Philippiens. L’apôtre y décrit comment nous devons nous comporter vis-à-vis du monde et tout ce qu’il nous propose :
Mes frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et mérite des éloges, tout cela, prenez-le en compte.

Ainsi donc, tout est clair!
Tout ce qui reflète, même inconsciemment, les valeurs de l’Évangile et les enrichit mérite notre attention et sert notre salut… Nous sommes donc, par essence, positifs à tout ce qui est grand et beau dans ce monde.
Par conséquent, nous ne sommes pas rétifs à la culture moderne, aux nouvelles technologies, au développement de la science, à l’évolution des sociétés, bref, au progrès.
C’est bien le contraire, le passé historique en témoigne. Les hommes de l’Église étaient précurseurs et animateurs dans plusieurs domaines : recherche intellectuelle, culture, musique, arts, agriculture, astronomie…
Nous sommes donc tous d’accord, théoriquement, chrétiens que nous sommes, pour aimer le monde, en contribuant aux différents niveaux de sa construction et de sa beauté.

Et ce que je viens de dire ne signifie nullement que nous accueillons bêtement tout ce que ce monde-là nous propose.
Tout ce qui ne respecte plus la création, la personne humaine, les valeurs morales bâties sur l’Évangile doit nous être irrecevable.
Et c’est justement là, bien souvent, que se trouve la pierre d’achoppement : ça coince !
Souvent, nous sommes taxés d’appellations peu flatteuses, qui nous décrivent comme dogmatiques, étriqués, ne comprenant pas l’évolution des mœurs et des sociétés.
Face aux virulentes critiques, aux propos acerbes et méprisants des soi-disant bien- pensants, nous perdons facilement la face…
En refusant la lutte, involontairement, nous agissons comme si, eux, étaient dans le vrai. Plutôt qu’entrer en débat d’idées et d’arguments pour faire évoluer les mentalités et progresser le Royaume des cieux, nous cédons le pas, préférant nous replier dans nos églises et nos sacristies.
Je comprends bien ce réflexe, mais je ne le cautionne nullement !

N’oublions pas ceci, mes frères et sœurs bienaimés :
ne confondons pas être mou et être doux !

Être doux et humble de cœur, à l’instar de notre Seigneur Jésus Christ, ne signifie en rien être amorphe et sans personnalité.
Là où le mal veut asservir le bien, le chrétien doit réagir avec conviction et détermination !
La parabole des serviteurs mauvais qui voulaient s’emparer d’une vigne ne leur appartenant pas devrait être pour nous un enseignement majeur : on ne laisse pas faire le mal par ses acolytes.
Le propriétaire de la vigne, bien évidement, a cherché des solutions pacifiques, envoyant des médiateurs pour raisonner les serviteurs rebelles, mais leur entêtement était tel que le maître dut finalement réagir catégoriquement, mettant fin à la mauvaise gestion de sa vigne et à l’injustice qui s’y propageait.

Mon cher Eudes,
dans un instant, tu seras baptisé…
Avec joie, je t’élèverai, au nom de notre mère chérie l’Église à la dignité d’enfant de Dieu : tu vas devenir pleinement l’un de nous ;
Nous en sommes vraiment heureux.
N’oublie pas, pourtant, que même si tu as à peine 10 ans, en tant que baptisé, disciple du Christ, du doit savoir choisir d’être toujours du côté du bien.
Sache le choisir… et l’affirmer. Sache le cultiver.
Et, inversement, sois intransigeant avec le mal !
Ne le laisse pas rabaisser la dignité que je te conférerai dans un instant…
Ne le laisse pas te ravir le Royaume des cieux dont tu vas devenir, bientôt, le légitime héritier…

Amen

1 Ted KYLE, Ruth PETERS, John TOOD et…, Poradnik homiletyczny, Oficyna Wydawnicza VOCATIO, Warszawa 2016, n° 1229, p.287