Homélie : Il est plus facile de se souvenir des dates de vacances que des commandements. 5ème dimanche de Pâques, année B Le 29 avril 2018

Publié le Publié dans Homélies

Père Przemyslaw KREZEL
Paroisse St Pierre et St Paul
en Val d’Azergues
Diocèse de Lyon

Il est plus facile de se souvenir des dates de vacances
que des commandements

Homélie 5 dimanche de Pâques, année B
Le 29 avril 2018
– fête de conscrits classes en 8 –

Lectures :
Act 9,26-31 : Paul se joint aux Apôtres témoins du Christ
1 Jn 3,18-24 : aimer non pas avec des paroles et des discours, mais par de actes et en vérité.
Jn 15,1-8 : Moi, je suis la vrai vigne…

Je pense que le texte de l’Évangile d’aujourd’hui est net et clair pour nous tous. Il devrait en être ainsi, puisque nous vivons dans une région viticole où côtoyer des champs de vignes est monnaie courante.
Peut-être même que plusieurs d’entre nous ont travaillé dans la vigne pour gagner quelques sous supplémentaires. Peut-être que certains ont un membre de leur famille viticulteur. Où, tout simplement, les fenêtres de votre maison donnent sur un vignoble.
Bref, l’image de la vigne nous est bien familière. Nous saisissons donc facilement le message que notre Seigneur voulait transmettre à ses auditeurs.
Il est le suivant :
le chrétien doit être connecté – branché – au Christ comme les sarments sont greffés au pied de vigne. La vitalité du chrétien dépend de sa communion constante avec le Christ. Sans elle, le chrétien – sa foi – se meurt, se dessèche, se voue à la perdition.
Par conséquent, mes frères et sœurs bienaimés, l’Evangile devrait nous être, aujourd’hui, particulièrement compréhensible.

En est-il vraiment ainsi ?
J’ose penser que oui…

Par contre, afin de démontrer que l’évidence du message d’évangile ne se traduit pas forcement dans des actes concrets, je vous propose de réfléchir à la logique des choses. Vous verrez que les causes et ses conséquences naturelles sont, dans la plupart des cas, admises par la raison d’homme mais qu’elles n’en sont pas nécessairement suivies d’effets. Notre volonté y fait défaut.

Ainsi, que diriez-vous d’un chiot s’il naissait, ayant à la place de ses oreilles, des oreilles d’âne ?
Que diriez-vous, sans aucun doute ?
Que c’est une anomalie !
Et si un pommier, au lieu de vous donner de belles et croquantes goldens, vous donnait des châtaignes ?
Et si les poiriers, dont le fruit fait la renommée de notre village, produisaient des poires insipides ?
Ne vous exclameriez-vous pas :
C’est catastrophique !
Peut-être même que certains iraient jusqu’à dire : c’est foutu !
Et ils auraient parfaitement raison puisque dans la vie les effets suivent toujours leurs propres causes. Un tel monde peut donc être prévisible, vivable et constructible. La logique des choses aide donc à le développer.

En revanche, ce qui fait notre unanimité joue d’une curieuse exception sur le plan spirituel.
Par exemple, si je vous disais :
– Croyant… mais non-pratiquant
– Croyant en Jésus Christ… mais niant sa résurrection
– Baptisé… mais bafouant l’Evangile …

A priori, nous devrions être scandalisés par ce manque cruel de logique.
Cependant, ce n’est pas du tout le cas.
Bien au contraire : nous cautionnons plutôt cet état de fait.
Ce que nous n’admettrions jamais dans la vie du quotidien profane, dans le registre spirituel, nous le tolérons aisément. Les incohérences métaphysiques et morales ne nous font pas tilter… Nous les estimons même normales.

Cette situation-là est due, entre autres bien évidement, à l’ignorance de Dieu en qui l’on croit. Benjamin Franklin, l’un des pères fondateurs des États-Unis, s’étonnait :
Combien respectent la naissance du Christ !
Combien respectent ses enseignements !

Je suppose qu’il est plus facile de se souvenir des dates de vacances que des commandements !

A l’ignorance s’ajoutent les conceptions fausses et erronées de Dieu et de la foi en lui. Un prêtre, dans une vision qu’il eut un jour, note les paroles du Christ :
On a de moi tant d’idées fausses, même parmi les chrétiens, combien plus parmi ceux qui croient ne pas croire en moi. […]
Ils me jugent et me condamnent sans me connaitre ! Je suis biffé de leur horizon. Je n’existe pratiquement pas pour eux et pourtant je suis là.

Mes sœurs et frères bienaimés,
Afin de remédier à l’ignorance et l’erreur, il n’y a qu’une solution : le travail sur soi.
La foi en Dieu se reçoit, certes, mais surtout elle s’entretient et se pratique assidûment. La foi n’est pas de la magie. Elle est un dialogue constant et en vérité, entre l’homme et Dieu.

Mes chers conscrits, dites-moi :
Depuis combien de temps préparez-vous la fête d’aujourd’hui ?

Pour vivre seulement quelques jours d’une joyeuse folie, vous avez commencé vos préparatifs depuis un an, un an et demi ???
Combien des ventes de brioches, de soirées à thème payantes ou tous autres événements avez-vous organisé par classe afin de rassembler des fonds en vue du week-end des conscrits ?
Mais avant d’organiser tous ses événements, chaque classe devait élire son président, son trésorier et son secrétaire. Des réunions ont été organisées régulièrement en vue de planifier les différentes activités, désigner qui fait quoi (par exemple qui écrit la chanson de la classe, qui fait les affiches, qui s’occupe de la déco, de la musique ???).
Et puis encore penser à l’habit, au gibus orné d’un ruban de couleur qui indique l’âge des participants, au photographe, à l‘organisation du défilé… et encore à une multitude de toutes petites choses…
Pour que vous viviez bien votre fête des conscrits, vous vous êtes donné de la peine, depuis longtemps… et c’est tant mieux !

Mais pour autant, ne soyez pas non plus économes quant au soin de votre vie intérieure et de votre relation personnelle avec Dieu.

Le message de l’Évangile est précis :
La vigne, c’est le Christ, nous sommes les sarments.
Pour que nous donnions du fruit, il faut que nous cultivions notre foi afin qu’elle ne soit plus théorétique et de façade mais qu’elle soit comme la sève vivifiante : qu’elle nous donne la vie !

Et pour que cela se fasse, je vais partager avec vous une pensée du père Pierre Teilhard de Chardin, chercheur, paléontologue, philosophe et surtout prêtre fasciné par le Christ. Prenez-la comme un cadeau que je vous offre pour votre fête, afin qu’elle vous soit profitable :

« En Jésus, les âmes ont chaud, parce qu’elles communient entre elles… Mais, pour avoir part à cette joie et à cette vision, il faut qu’elles aient eu le courage, préalablement, de briser leurs petites individualités, et de se dépersonnaliser, en quelque sorte, afin de se centrer sur Jésus-Christ… »

Ainsi-soit-il